Panattoni et ADM revalorisent une friche industrielle pour l'édification d'une plateforme logistique à Beauvais dans l'Oise

En 1970, le fabricant de pièces détachées automobiles DBA installait sa production dans la zone industrielle de Beauvais (60). Un choix géographique stratégique, au carrefour des Hauts-de-France et de la région parisienne, apte à desservir une large superficie du nord au centre de la France. C’est en tout cas ce que laisse supposer l’occupation du terrain de 10 hectares par diverses entreprises industrielles pendant plus de 40 ans, jusqu’à son abandon en 2016.
À partir de là, on aurait pu croire la messe dite. Revitaliser un site en cessation d’activité, perclus de signes de contamination à l’amiante et de pollution des sols, doublé d’un gouffre financier de 300 000 € annuels de frais fonciers et de gardiennage : une vraie gageure opérationnelle et budgétaire... Difficile pour les élus de l'Oise, guère impossible pour les spécialistes de l’immobilier. Puisqu’en novembre 2021 se voit résolu le problème des mairies de Beauvais et Allonne, grâce à l’acquisition du terrain par un accord de partenariat noué entre la toute nouvelle branche française de Panattoni et le promoteur immobilier ADM, destiné à la construction d’une plateforme logistique éco-durable de 45 000 m².

Genèse tourmentée

Même une surface en friche peut présenter un atout, si les meilleures conditions se voient réunies. 15 hectares de surface – dont 5 issus d’un ancien terrain agricole contigu au site d’origine –, proche d'un grand axe routier desservi par l’autoroute A16, doté d’infrastructures optimales pour la réinfiltration des eaux de pluie, assez vaste pour la fluidité du fret… Justifiant de tous ces avantages, le site n’aurait-il pas même dû trouver preneur plus tôt ? « L’objectif était de le transformer en quartier d’affaires, mais le porteur de projets devait dépenser beaucoup d’argent pour le démontage et la dépollution », tempère Patrice Haezebrouck, maire d’Allonne. Tout projet se serait donc initié à budget déficitaire.

De cela, les co-instigateurs du projet logistique en étaient toutefois parfaitement conscients. « La question se posait, pour ADM, de trouver un partenaire pour permettre d’engager des fonds à risque avec un développement en blanc sur une ancienne friche industrielle, raconte Marceau Pinault, président du promoteur. Cette stratégie a été proposée à Panattoni, qui n’était pas encore présent en France à ce moment-là ; le projet s'est monté à la genèse des deux sociétés. »

La revitalisation du site de Beauvais représente en effet la toute première opération lancée par la branche française de l’investisseur en immobilier. Plus grand développeur logistique d’Europe depuis 2017 (8 millions m² de surfaces achevées entre 2020 et 2022 d’après une étude de PropertyEU), les fonds de Panattoni ont permis de conclure l'accord rapidement : « Nous avons levé les capitaux à l’aide de tous les partenariats commerciaux et institutionnels déjà en place à l'échelle européenne », confie Salvi Cals, directeur général France du groupe.

©Panattoni | De gauche à droite : Marceau Pinault, Caroline Cayeux, Salvi Cals, Patrice Haezebrouck et Ludovic Caleiro

Exploitation circulaire

Pour un investissement total de 34 millions d’euros, les grands moyens ont ainsi été mobilisés. « Il nous fallait offrir des surfaces sur un marché logistique où peu de constructions neuves sont produites convenablement, poursuit Salvi Cals. Nous avons donc travaillé sur un bâtiment de qualité par ses caractéristiques physiques, qui soit flexible et performant énergétiquement, tout en nous positionnant sur un foncier déjà artificialisé. » Panattoni parvient ainsi à exploiter deux fois plus de surface sans la moindre artificialisation supplémentaire.

Panattoni et ADM mettent également un point d’honneur à réutiliser le plus de matériaux issus de la démolition des structures en place, pour s’inscrire dans une démarche la plus vertueuse possible. 10 000 m3 de béton et enrobés ont ainsi été recyclés et concassés au profit de la nouvelle plateforme. BEG Ingénierie, contremaître du chantier, profite ainsi d’une revalorisation à hauteur de 85 % des éléments extraits de l’ancien site. Dans une logique de circuit court qui plus est, grâce à un partenariat avec la filiale de l'Oise du spécialiste de la déconstruction mécanique Cardem et les carrières proches de la zone commerciale de Beauvais-Allonne.

Soucieux de leur démarche écologique, Panattoni et ADM concentrent tous les efforts possibles dans la conduite d’un projet décarboné. À un chantier éco-responsable valorisant les matériaux recyclés s’ajoute une architecture favorisant l’économie d’énergie. « En termes de performances énergétiques, l’inertie de la structure fait que le projet ne requiert globalement pas de chauffage, sinon pour les périodes de froid extrême dans les bureaux ou pour répondre aux contraintes d’exploitation de produits nécessitant un stockage à une température donnée », détaille Marceau Pinault. Le site disposera aussi, à terme, de son propre local photovoltaïque, pour produire de l’énergie d’origine renouvelable et en partie redistribuée au sein du Beauvaisis.

Logistique opérationnelle

Au terme de douze mois de travaux, BEG Ingénierie livrera en novembre 2023 une plateforme visant le niveau Very Good de la certification BREEAM – label attestant de l’écoresponsabilité des bâtiments –, forte de 41 979 m² de surface de stockage répartie en neuf cellules de 1 500 à 6 000 m². Soit la capacité théorique de quatre clients ; les quatre plateformes de chargement opérationnelles lors de l’inauguration parlent d’elles-mêmes. Pour l’heure, Salvi Cals se veut malgré tout plus mesuré : « Il y aura sans doute deux utilisateurs présents sur le site, projette-t-il. Le bâtiment permet de toucher toutes les tailles de surface, de 7 000 à 45 000 m², mais nous favoriserons la location par des entreprises avec un fort pedigree industriel. »

Le futur entrepôt n'a pas été pensé comme un projet sur-mesure pour autant. « Nous avons conçu le site de manière qu’il soit universel, pour convenir au maximum d’utilisateurs possible, confie Marceau Pinault. La présence d’un bâtiment de nouvelle génération, disponible, avec une livraison qu’on sait datée à la semaine près, constitue un réel atout et va permettre à des entreprises locales ou non d’imaginer une implantation sur le territoire du Beauvaisis. » Une attractivité que permettront les infrastructures de parcage, prévoyant une vingtaine d’emplacements pour les poids lourds et rehaussées de 273 places pour les véhicules légers, dont 55 électriques. Panattoni estime à environ 500 000 m3 la quantité de fret annuellement amenée à transiter par la plateforme, d’après une simulation.

Un tel volume de marchandises à traiter justifie d’autant plus des prédispositions de Panattoni et ADM en faveur de la décarbonation à court et long terme. Non content de se conformer à la Charte d’engagements réciproques signée en 2021 par une cinquantaine d’acteurs de l’immobiliser logistique, la future plateforme de Beauvais se hisse comme site pilote des bonnes pratiques qu’elle promeut. « Ce projet sert aujourd’hui de maître-étalon et de prototype pour le suivi de cette Charte, ce dont nous sommes extrêmement fiers », s’enthousiasme Salvi Cals. « Il s’inscrit dans cette vision nouvelle d’une économie plus attentive aux impacts de l’environnement et sur l’aménagement du territoire », confirme Caroline Cayeux, présidente de la communauté d’agglomération du Beauvaisis, validant la dynamique positive engendrée à l'échelle locale par la mise en route du chantier.

©Lothaire Berthier