Transversal
EVE : quand le transport entreprend son virage vert
Pour sa quatrième édition, le 7 février dernier, le rendez-vous EVE a déployé, grâce à l’intervention d’acteurs du secteur des transports, une ribambelle de bonnes pratiques visant à endiguer les émissions GES pour atteindre une neutralité carbone pour 2050.
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Antoine Repesse
Il y a des rendez-vous phares à ne pas rater dans le monde de la logistique. Des rendez-vous incontournables. Celui du programme Engagements Volontaires pour l’Environnement (EVE) en fait partie. Porté par une pléiade d’organisations professionnelles (l’Ademe, FNTV, FNTR, GCF, EcoCO2, AUTF, CEE, TLF et Otre), cet évènement qui s’est tenu, pour sa quatrième édition, ce 7 février à la Cité internationale universitaire de Paris, vise à prodiguer aux entreprises des enseignements pour réduire leur impact énergétique et environnemental. Philippe Machu, chef du bureau de la performance économique et environnementale des transports routiers au sein de la DGITM, y introduisait les chiffres clés du programme : « EVE, c’est plus de 3 300 entreprises engagées et 2 440 en cours d’engagement », entame-t-il avant d’enchaîner sur des chiffres aussi encourageants les uns que les autres. À retenir notamment le gain global d’émissions GES par l’ensemble des entreprises à l’issue de leur engagement – 1 062 000 tCO2 en 2022 – ou encore celui correspondant aux économies d’énergie sur la même période : 3.332 TWh.
Les leviers de la décarbonation
Passée cette entrée en matière du traditionnel bilan, le rendez-vous embraye sur un focus qui entre dans le vif du sujet. Le thème : « Technologies, sobriété : comment accélérer la transition des transports ? ». Outre le fondamental rappel selon lequel la part du pétrole dans la consommation d’énergie des transports en France fait l’effet d’un scrutin à la soviétique (91 %), Aurélien Bigo, chercheur sur la transition énergétique des transports, se repose sur sa thèse pour détailler les trajectoires d’émissions des transports en France depuis 1960. Se basant sur les analyses du passé, il envisage l’avenir d’ici 2050 via cinq leviers de décarbonation des transports fixés par la Stratégie nationale bas-carbone (qui vise une neutralité carbone pour 2050) : la modération de la demande de transport, le report modal, le remplissage des véhicules, leur consommation énergétique, la décarbonation de l’énergie. Pour le chercheur, le constat est sans appel : si tous les leviers ont leur importance (jusque -25 % sur les émissions GES pour la demande de transport ; -20 % sur les émissions pour le report modal, -15 % pour le taux de remplissage…), à court terme, le principal reste l’efficacité énergétique : « L’enjeu est de ne plus avoir une seule goutte de pétrole dans les véhicules motorisés, rappelle Aurélien Bigo. Et à court terme, l’électrique est la meilleure alternative car c’est l’énergie la moins carbonée. »
La bataille des émissions GES
Face au constat du chercheur, les échanges entre les entreprises se multiplient. La conférence intitulée « Adaptation, formation, innovation : comment les entreprises agissent-elles pour la transition écologique du secteur du transport ? » liste les engagements des intervenants. « Nous sommes passés à l’électrique, indique Bruno Kloeckner, directeur général France de XPO Logistics. Nous avons commandé une centaine de véhicules pour livrer l’hyper-urbain. Nous restons aussi au gaz, malgré les conditions d’exploitation difficile en 2022. Et enfin, nous croyons aussi au HVO, un carburant plus qu’intéressant pour décarboner les flux de nos clients. » Autre témoignage, celui d'Aurélie Alexis, présidente d’Alexis Déménagement : « En combinant le rail-route, l’éco-conduite et la géolocalisation pour éviter de rouler à vide, nous avons constaté une baisse des émissions de CO2 de 15 % ». Cette baisse d’émissions, Boulanger la constate aussi. Si les chiffres de 2022 n’ont pas encore été dévoilés, les engagements de l’enseigne – qui a intégré Fret21 (dispositif de l’Ademe qui incite les entreprises à mieux intégrer l'impact environnemental dans leur stratégie) – ont assuré de bons résultats pour 2021 avec une diminution des émissions GES de 13 %. De son côté, Céline Luc, directrice gestion des talents/formation chez Stef assure viser, sans préciser l’échéance, un objectif de -30 % d’émissions GES : « 5 % viendra de la sensibilisation et l’optimisation des plans de transports et 25 % des investissements matériels avec l’intégration de carburants comme le biodiesel et le biogaz ».
L’éco-conduite fait l’unanimité
Si les chiffres diffèrent quelque peu, tous les participants s'entendent sur un sujet : l’éco-conduite. « Cela nous permet d’économiser 3 litres au 100 km pour les conducteurs les plus expérimentés, souligne François Herviaux, PDG de Linevia. Sans compter le gain de temps que les conducteurs constatent sur leur temps de trajet ». Pour s’assurer que l’éco-conduite soit pérenne au sein de son entreprise, le PDG a mis en place des formations à destination de ses employés : « Nous leur fournissons un accompagnement tous les 18 mois et ils repartent sur les routes 30 minutes après pour mettre en pratique ce qu’ils ont appris ». Un intérêt pour l’éco-conduite également manifesté par le directeur général France de XPO Logistics : « Nous avons mis en place des formations e-learning pour les équipes d’exploitation, de maintenance, les commerciaux… Tout le monde est concerné par les bonnes pratiques en général et l’éco-conduite en particulier. »
14 lauréats
Après le temps des échanges, vient celui des récompenses. « Le Rendez-vous EVE », c’est aussi l’occasion de récompenser ces actions. Et parmi les 14 lauréats figurent un coup de cœur du jury remis à J.Millet, pour ses bonnes pratiques en termes de RSE notamment, un trophée « Meilleure progression chargeur » du dispositif Fret21 remis à Mapei France qui a dépassé son objectif avec 2 338 tonnes d’émissions de CO2 évitées sur trois ans. Un trophée « Meilleure performance route » dans la catégorie transport de marchandises avec plus de 50 salariés a également été décerné à Étoile Routière, qui s’est inscrit dans la charte Objectif CO2 en 2019 pour un cycle de trois ans avant d’obtenir la labellisation Objectif CO2 en mars 2022) et un autre « Meilleure progression » dans la catégorie commissionnaire de transport pour SATM, qui s’est fixé pour objectif une baisse de 5 % de réduction de ses émissions de GES sur la période 2020 à 2023).