Transversal
Travailler ensemble pour mieux travailler : cultiver la collaboration dans la supply chain bretonne avec le projet ACT’supply
Une tribune signée par Bretagne Supply Chain, cluster regroupant les acteurs du transport, de la logistique et de la supply chain en Bretagne.
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Supply chain, logistique et transport : un appel à l’amélioration des conditions de travail
Les secteurs du transport et de la logistique, et plus largement de la supply chain, sont indispensables. En Bretagne ce sont 8 à 10 % des emplois qui sont liés à ces secteurs. Au national, la supply chain représente 10 % du PIB français. Pourtant, ces métiers sont encore méconnus et font face à de nombreuses problématiques : manque d’attractivité, pénurie de main-d’œuvre, pénurie de matières, mais aussi des crises sanitaires, militaires, écologiques et économiques.
La bonne gestion de leur activité se complexifie chaque jour et parfois au détriment des conditions de travail des salarié.e.s. Les entreprises avancent alors dans un cercle vicieux : les conditions de travail se dégradent, entraînant des absences voire des démissions, dans un contexte de plus en plus tendu pour recruter, dégradant donc de plus en plus les situations de travail des personnels présents.
Alors, pour fidéliser les équipes, réduire les départs et augmenter l’attractivité des métiers, l’amélioration des conditions de travail se présente comme une solution puissante. Il existe différents moyens d’agir dans son entreprise dans un but d’améliorer les conditions de travail. Cependant, comment agir lorsque les conditions de travail sont impactées par les exigences des clients ou les contraintes des fournisseurs ?
C’est le cas dans cette usine de dessert : « Pour ma production, je dois acheter des blocs de beurre. Comme je ne commande pas assez de beurre, le conditionnement proposé par mon fournisseur est trop lourd pour mes équipes, explique l’approvisionneuse. Pourtant, je ne peux pas en commander plus car je n’ai pas la possibilité de les stocker. Comment faire ? »
Ces problématiques sont nombreuses dans les métiers de la supply chain. Pour les approfondir et chercher des solutions concrètes, l’association Bretagne Supply Chain a alors regroupé 8 entreprises pionnières, 5 préventeurs CARSAT et une quinzaine de partenaires dans le projet ACT’supply. Les entreprises ont des tailles et des profils variés car l’ambition de ce projet est d’aider les professionnel·le·s de tous les secteurs à comprendre, identifier et limiter l’impact de ces causes externes dans le but d’améliorer la santé et la sécurité des métiers de la supply chain, de la logistique et du transport. Et cela passera par un dialogue client-fournisseur.
Au-delà des évidences : ACT’supply analyse comment les décisions externes impactent les conditions de travail
Dans la supply chain cela a toujours été le cas : une décision en amont se répercute sur l’aval et inversement. Les relations client-fournisseur ne sont donc pas épargnées. Pourtant, les entreprises peinent à agir car cela pourrait nuire aux délais, à la qualité de leurs produits, au marketing de leurs produits, ou encore parce qu’il n’y a pas de client ou de fournisseur comparable.
« L’intention du projet ACT’supply est de rendre les entreprises autonomes pour enclencher le dialogue avec leur client ou leur fournisseur afin d’améliorer les conditions de travail dans leurs métiers, explique Elodie Le Provost, la déléguée générale de Bretagne Supply Chain. Il s’agit de leur donner les moyens de mesurer, d’engager un dialogue constructif avec les clients et fournisseurs et d’identifier des solutions pertinentes déjà opérationnelles ailleurs. » Leur objectif est de co-construire d’ici 2024 un ensemble d’outils permettant aux entreprises de trouver des solutions durables.
Pour y parvenir, le projet a débuté il y a plusieurs mois par une phase de diagnostics ergonomiques dans les différentes entreprises pionnières. L’entreprise Ergotec réalise ces diagnostics avec pour objectif premier d’observer tous les impacts sur les conditions de travail dans les entreprises. « En faisant des interventions dans des entreprises de transport ou de distribution, je me suis rendu compte que je recevais la réponse : "Pour ça, nous ne sommes pas maîtres de la situation, c’est le client" ou "c’est le fournisseur", "c’est le sous-traitant". "Nous ne pouvons pas agir dessus et nous sommes alors limités dans nos plans d’actions", explique Aude Ladam, l’une des ergonomes. Je trouve cela intéressant de pouvoir essayer d’avoir une action sur ces causes externes et d’avancer sur ce sujet. »
Quelques analyses ont déjà pu être finalisées et mettent en avant, sans surprise, des impacts sur les conditions de travail externes, internes mais aussi les deux. À l’issue de ces analyses, Bretagne Supply Chain prévoit un évènement pour présenter publiquement les travaux.
Des témoignages qui résonnent déjà : les constats partagés sur les conditions de travail dans les entreprises pionnières
Dans les différentes entreprises, les premiers témoignages résonnent déjà et laissent apparaître des similarités. Présentées précédemment, ces entreprises ont des profils variés. On compte des entreprises de production, de transport et de distribution. Les secteurs d’activités vont de l’alimentaire sec aux matériels agricoles en passant par la boisson, le textile, la menuiserie, la meunerie, les matériaux de constructions et les produits du e-commerce.
Pourtant, malgré leurs spécificités, des constats se rejoignent concernant les conditions de travail. « J’ai du mal à livrer mon client, la route n’est pas bien accessible et son espace de stockage est à la cave. Je dois porter et ce n’est pas bien sécurisé », expliquent les livreurs en meunerie et en boissons. « Les emballages de notre fournisseur sont lourds et cela ajoute un poids conséquent à la manutention. Nous avons beaucoup d’arrêts de travail sur ces postes », constatent les responsables de réception de matériels agricoles et du e-commerce.
Ces constats partagés forment une base solide dans les analyses. Ils représentent les cas les plus courants d’impacts externes sur les conditions de travail, peu importe l’entreprise, le secteur ou la taille. Grâce à eux, il sera possible d’identifier un besoin commun et donc des idées de solutions communes permettant d’enclencher le dialogue. Ces solutions pourront convenir aux situations malheureusement les plus fréquentes dans la supply chain.
Pour cela, le projet prévoit de co-construire des outils avec les différents participants. « Le mot outil est un peu ambigu. On pense vite à un outil numérique ou technologique. Les outils auxquels nous pensons avec les entreprises auront des formes simples et variées : un glossaire, des cartographies, des fiches de mesures ou encore des fiches actions, explique Caroline Bader, la chargée de missions de Bretagne Supply Chain. Tout pour permettre aux entreprises d’engager un dialogue impactant et constructif avec leur client et leur fournisseur en toute autonomie. »
Ces outils seront nourris par la veille, les analyses ergonomiques, les retours d’expériences des entreprises pionnières et des réseaux des partenaires du projet.
Pour découvrir les résultats des diagnostics et les premières conclusions et pistes d’action, vous pouvez vous inscrire à l’évènement de Bretagne Supply Chain le 14 novembre 2023 prochain (participation gratuite sur inscription). Cet évènement aura lieu à la CCI Ille-et-Vilaine à Rennes et l’inscription se fait en ligne sur le site bretagne-supplychain.fr.