[Reportage] À quelques jours du démarrage du nouveau hub de fret aérien de Kuehne+Nagel, sur l’aéroport Paris CDG

Des allées presque désertes, au silence que seul perturbe un puissant bruit régulier d’atterrissage d’avions. Des peintures fraiches, des racks vides, et un poste de sécurité sans le moindre agent. Le nouveau hub francilien de Kuehne+Nagel, dédié au fret aérien et désormais terminé, est en phase de transit. D’ici quelques jours, de nombreuses palettes emplies de marchandises variées y feront escale, et l’activité déploiera rapidement ses ailes. Placé dans la Cargo City, vaste plateforme du groupe ADP située à Tremblay-en-France (93) et à quelques encablures de l’aéroport Paris-Charles de Gaulle, la gare de fret se prépare à accueillir ses voisins issus d’un autre site de 5 000 m². « À partir du week-end prochain, nous déménagerons l’ensemble des équipes de nos bureaux se situant actuellement en face vers ce nouveau bâtiment, annonce Francis Seuront, directeur du métier aérien chez Kuehne+Nagel, en ouverture de l’inauguration dudit hub organisée ce 19 octobre 2023. Ainsi que l’ensemble du fret du magasin ; tout cela sera fait en 24 heures, en conformité avec toutes les autorisations nécessaires requises principalement auprès des autorités douanières. » Presque deux fois et demie plus grand que le précédent, l’entrepôt flambant neuf du prestataire de transport et de logistique, qui s’étend sur 12 900 m², accueillera en une fulguration 260 salariés.

D’une pièce de rechange à un traitement vital, il n’y a qu’un pas

Adapté aussi bien, dans sa zone de réception principale, à la gestion des marchandises issues du luxe, de l’aéronautique, de la high-tech, ou encore entre autres à l’industrie automobile, le hub aérien de Kuehne+Nagel verra transférer des biens de toutes tailles. « Nous passons d’une sonde Pitot* grosse comme ma main à un capot moteur d’A380, que nous sommes capables d’envoyer à l’autre bout de la planète », illustre Christophe Martinot, responsable des opérations nationales de fret aérien du transitaire, en présentant la cellule de fret cargo. L’une des autres spécificités du groupe, facilitée par ce bâtiment de dernière génération, réside dans sa capacité à pouvoir contrôler, traiter et acheminer des produits sensibles du secteur des soins de santé. Il propose ainsi différentes cellules allant de : +15 à +25°C pour la plupart des médicaments retrouvables dans les étalages et les tiroirs des pharmacies ; +2 à +8°C pour les produits plus sensibles comme certains vaccins et l’insuline ; et jusqu’à -20 à -80°C pour des réactifs de laboratoires comme les premières générations de vaccins Covid-19 par exemple. S’y adjoignent des instruments de congélation extrême, via de la cryogénisation à l’azote liquide, permettant d’atteindre les -150 °C ou encore moins pour garantir le stockage stable d’organismes cellulaires.

Des transbordages nécessitant le bon emballage

Eu égard à la diversité de conservation de ces produits, Kuehne+Nagel conseille par ailleurs ses clients pour choisir l’emballage le plus adapté. « Lorsqu'un envoi est effectué par avion entre +2 et +8 C° par exemple, plusieurs étapes ne permettent pas au fret de se situer entre ces températures, explique Sandrine Levilain, responsable nationale des opérations healthcare du fret aérien du prestataire. Notamment lors du transfert pour aller livrer la compagnie aérienne, lors de la palettisation de la marchandise, ainsi que pendant les étapes de chargement et de déchargement de l’avion. Ce sont des phases à risques, pour lesquelles le conditionnement joue un rôle primordial puisqu’il va soit ralentir, dans le cadre d’un emballage passif, les effets de la température extérieure, soit pour ceux les plus évolués être capable de refroidir ou de réchauffer les produits en fonction de ce critère externe et de nos paramétrages décidés en interne. » Via sa compagnie Quickstat – filiale de la société américaine Quick International Courier, spécialisée dans le transport urgent et rachetée fin 2018 par Kuehne+Nagel –, adepte des solutions logistiques sur mesure et des livraisons au quart d’heure près dédiées aux soins de santé, le prestataire dispose également d’une expertise sur site dans le transit de nouveaux traitements. Dont ceux liés à la thérapie cellulaire et pouvant atteindre des sommes mirobolantes.

Rex et x-ray vont faire la paire

Pour éviter notamment que des médicaments impliqués dans des traitements de thérapie génique (comme le Hemgenix aux États-Unis pour lutter contre l’hémophilie, approuvé par la FDA et dont une dose dépassait les 3 millions de dollars fin 2022**) puissent tomber entre de mauvaises mains, de nombreuses barrières de sécurité parsèment le hub. Situé en zone internationale, le site du transporteur et logisticien sera soumis à un contrôle régulier des autorités douanières. Un grillage le divise d’ailleurs en deux, avec un poste de contrôle situé sur l’extrémité aéroportuaire. Un duo de choc viendra compléter le dispositif : la brigade cynophile de la douane et un système de détection aux rayons X. « Sans le chien, nous ne pourrions pas faire voyager plus de la moitié de notre marchandise aujourd’hui, relate Christophe Martinot. L’autre passe par le x-ray. » Les canidés travailleront 50 % du temps lors de leurs inspections olfactives guidées par leur maître, avec un repos de 30 minutes pour chaque heure de reniflage de sacs Louis Vuitton et de composants de Tesla.

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* Inventé par le physicien français Henri Pitot en 1732, le tube de Pitot est un instrument conçu originellement pour estimer la vitesse des fluides, comme l’eau d’une rivière ou d’un fleuve par exemple. Devenue aussi, les siècles passant, une sonde de mesure indispensable dans l’aéronautique, la sonde Pitot permet aujourd’hui de calculer la vitesse relative d’un avion et la pression que celui-ci subit en traversant l’air.
** Sources : Hemgenix given to treat first hemophilia B patient in US, Hemophilia News Today ; FDA Approves First Gene Therapy to Treat Adults with Hemophilia B, U.S. Food & Drug Administration.