Emploi/RH
Face à face : Samya Bellhari-Trahin de GXO et Laurent Pottier de l’Agefiph
Samya Bellhari-Trahin, responsable ergonomie, QVT, maintien dans l’emploi et gestion du handicap chez GXO Logistics et Laurent Pottier, chargé de mission à la direction de la mobilisation du monde économique et social à l’Agefiph, nous détaillent leurs missions, leur partenariat et leurs actions concrètes en matière d’inclusion.

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GXO ; Agefiph | Samya Bellhari-Trahin, responsable ergonomie, QVT, maintien dans l’emploi et gestion du handicap chez GXO Logistics et Laurent Pottier, chargé de mission à la direction de la mobilisation du monde économique et social à l’Agefiph.
GXO est très engagé sur le sujet de l’inclusion, pouvez-vous nous donner les grandes lignes de sa politique en la matière ?
Samya Bellhari-Trahin : Nous portons cinq valeurs fondamentales, dont l’inclusion. Chez nous, être inclusif signifie prendre soin de nos collaborateurs et de nos clients. Au travers de cette valeur, nous défendons également les questions de diversité et d’appartenance. Nous menons des groupes de travail sur le sujet, à la fois pour faire connaître notre secteur, souvent considéré comme difficile et masculin, mais aussi travailler sur l’attractivité de nos métiers, renforcer la fidélisation de nos collaborateurs ainsi que la qualité de vie et l’amélioration des conditions de travail. Depuis 2022, nous assurons le suivi de 45 indicateurs sur les questions de genre, d’âge, de génération, de culture et de handicap. Nous avons également mis en place un calendrier d’actions à mener sur chacun de ces axes via une politique dédiée. Enfin, nous avons particulièrement travaillé ces trois dernières années sur le handicap afin de développer une véritable stratégie de maintien dans l’emploi.
Pouvez-vous nous rappeler les missions de l’Agefiph ?
Laurent Pottier : L’Agefiph est un fonds de développement ayant pour mission principale l’insertion et le maintien dans l’emploi des personnes en situation de handicap, avec un objectif global de rendre le marché de l’emploi plus inclusif. Pour ce faire, l’Agefiph construit et finance des solutions pour compenser les conséquences du handicap au travail, soutient les acteurs de l’emploi, de la formation et les entreprises pour que soient pris en compte les besoins spécifiques des personnes en situation de handicap.
Comment GXO et l’Agefiph collaborent-ils ?
Samya Bellhari-Trahin : Le cheminement vers l’Agefiph a été assez naturel, il s’agissait d’inscrire notre engagement au travers d’un travail commun avec un partenaire expert. L’idée est née il y a trois ans avec l’ambition de définir des objectifs chiffrés, de lancer une nouvelle dynamique auprès des équipes de terrain, d’animer notre réseau de façon plus professionnelle et de consolider notre démarche. L’Agefiph nous a offert un conseil et un accompagnement dans la mise en place d’une politique handicap volontariste et ambitieuse. C’est dans ce cadre que nous avons signé une convention de partenariat le 24 janvier 2024.
Laurent Pottier : Nous avons réuni un comité de pilotage et défini plusieurs axes de développement, notamment la formation des managers et des relais et référents handicap. 600 managers vont être formés et 10 000 collaborateurs sensibilisés. GXO s’est également fixé un objectif de 150 recrutements sur trois ans. Par ailleurs, il a été convenu de déployer un axe autour du maintien en emploi et de l’évolution professionnelle des personnes en situation de handicap. Enfin, l’Agefiph met en relation les entreprises adaptées et les plateformes de GXO.
En quoi le secteur est-il porteur pour l’emploi des personnes en situation de handicap ?
Laurent Pottier : Ce sont des métiers en tension depuis plusieurs années. Nous travaillons avec Aftral, l’AFT, l’Opco Mobilités, l’État… pour les ouvrir aux personnes en situation de handicap. Aujourd’hui, de nouvelles technologies sur les véhicules existent, des centres de formations sont accessibles, les portes sont ouvertes pour les travailleurs en situation de handicap dans le secteur. Ils sont 50 000 demandeurs d’emploi sur ces métiers, notre travail est de permettre une adéquation entre ces besoins. Nous avons développé un outil appelé Pré-Évaluation des Capacités à la Formation (PECF) permettant d’évaluer les aptitudes physiques mobilisables pour les métiers du transport et de la logistique, notamment la conduite de camions, d’autocars, de chariots de manutention ou de levage pour la logistique, ainsi que les activités annexes. Cet outil aide également à mesurer les capacités restantes d’une personne en situation de handicap et son potentiel de formation. Il repose sur un simulateur, une équipe pluridisciplinaire et un plateau technique permettant des mises en situation. Nous brossons le portrait de la personne dans l’environnement transport et logistique afin qu’elle puisse ensuite s’inscrire dans un centre de formation et disposer d’outils adaptés.
En 2011, GXO et le groupe à but non lucratif ARES créaient Log’ins. Pouvez-vous nous rappeler ce qu’est Log’ins et nous expliquer les apports concrets de cette joint-venture ?
Samya Bellhari-Trahin : Log’ins est une joint-venture sociale proposant un parcours à des personnes éloignées de l’emploi et majoritairement en situation de handicap, au travers d’un accompagnement de 24 mois maximum. Ce parcours se fait principalement en logistique. Nous avons donc des collaborateurs Log’ins en implant chez GXO. Ces derniers bénéficient d’aides au quotidien pour trouver un logement ou encore mener des démarches administratives. Au cours des 12 dernières années, 72 % d’entre eux ont trouvé un emploi ou ont reçu une formation supplémentaire. Pour GXO, l’objectif final est de pouvoir embaucher ces salariés et de construire une passerelle entre cet environnement plus adapté et celui, plus classique, de la logistique.
Quels sont les projets marquants menés chez GXO en matière d’inclusion ces dernières années ?
Samya Bellhari-Trahin : La création de notre réseau relais handicap a été un élément majeur dans le développement de notre politique. Nous avons assuré la formation de 140 personnes et avons désormais un binôme Relais handicap/RH sur tous les sites de France. Ils ont pour mission d’accompagner nos collaborateurs et de rencontrer des interlocuteurs tels que Cap emploi ou les agences d’intérim, afin de leur rappeler que nous sommes une entreprise ouverte, capable d’intégrer des personnes en situation de handicap. Parallèlement, nous travaillons avec des partenaires comme Kialatok, qui utilise des ateliers de cuisine du monde comme outil pédagogique, ou une association handisport sur l’un de nos sites à Saint-Michel-sur-Orge (91). Enfin, sur ce sujet du sport, nous avons accueilli Fabrice Morgado, joueur de cécifoot, champion paralympique aux JOP 2024. À chaque fois, cela bouleverse nos équipes et permet de lever les stéréotypes. Ces partenaires nous permettent aussi d’aborder d’autres types de handicap, souvent invisibles et dont on parle moins ou peu.
Quels seraient les éléments clés d’une politique volontariste et efficace dans les entreprises de notre secteur en matière de handicap ?
Laurent Pottier : Je dirais : une stratégie globale fondée sur une structuration de la politique RH, un engagement de la direction générale, un dialogue social et une mobilisation interne. Depuis la loi de 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, le secteur avance : le taux d’emploi dans la branche transport est de 4,8 %, versus 4,4 % il y a trois ans. Mais il faut encore que la parole se libère, que les personnes concernées soient rassurées et ne se sentent pas mises en difficulté. Pour cela, il faut former les managers et sensibiliser autour de ce sujet. Les JOP 2024 ont été un vecteur considérable, nous n’avons jamais été autant sollicités que depuis cet événement.
Existe-t-il des innovations ou des démarches intéressantes pour faciliter encore davantage l’inclusion dans la logistique et le transport ?
Laurent Pottier : La Pré-Évaluation des Capacités à la Formation auditive vient d’être créée. Nous allons également travailler sur la PECF liée aux troubles du neuro-développement afin de réfléchir à comment accueillir un public avec des séquelles d’AVC, ayant des troubles du spectre autistique ou un déficit intellectuel. Nous menons également un gros travail sur les Caces afin de les rendre accessibles aux personnes en situation de handicap et projetons l’achat d’un nouvel Handi Truck, un camion-école aménagé pour former les personnes en situation de handicap.
