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La Charte d’engagements pour la réduction de l’impact environnemental du commerce en ligne entend faire naître, grâce aux actions de ses signataires, un « consomm’acteur » soucieux de ses actes d’achat. Un nouvel acheteur sensibilisé aux problématiques de réduction du volume des emballages, autre axe fort de l’accord signé par les web-marchands.
1. Associer le consommateur et viser des livraisons plus vertes
Selon la quatrième édition de l’étude menée par KPMG et la Fevad publiée en novembre 2020, dédiée à l’innovation dans l’e-commerce, 70 % des cyberacheteurs indiquaient privilégier les sites qui mettent en avant une démarche responsable ; et 53 % (62 % parmi ceux de la génération Y) déclaraient tenir compte d’éléments environnementaux, responsables ou éthiques dans leurs habitudes de consommation en ligne. Ce consommateur, la Charte d’engagements pour la réduction de l’impact environnemental du commerce en ligne veut le transformer en « consomm’acteur » et lui dédie ses quatre premiers engagements. Le premier consiste à « informer le consommateur de l’impact environnemental de la livraison en lui proposant, à partir du 1er janvier 2023, plusieurs modalités de livraison des produits (par variation du point de livraison, du délai ou des véhicules) pour toutes les commandes dont le gabarit le permet, et en précisant le choix qui a, en moyenne, le plus faible impact sur l’environnement selon les résultats des travaux de l’Ademe sur l’évaluation environnementale des livraisons du e-commerce ». Le deuxième entend « favoriser les bons gestes de commande en s’abstenant d’inciter le consommateur à commander plusieurs références d’un même produit (par exemple, plusieurs tailles d’un même vêtement) pour n’en garder qu’une seule et en mettant en œuvre des actions visant à limiter les retours (par exemple : appeler l’attention du consommateur sur le bilan environnemental d’un retour de produit, améliorer l’information sur les produits vendus, proposer des outils permettant au consommateur de s’assurer qu’il commande la taille adéquate) ». Le troisième vise à « encourager les bons gestes en rappelant les consignes de tri et de réemploi au consommateur » tandis que le quatrième prévoit « à partir du 1er septembre 2022, d’offrir au consommateur la possibilité d’identifier les produits du catalogue au meilleur bilan environnemental, en raison, par exemple, de leur lieu de production, de leur lieu d’expédition, de leur performance environnementale attestée par un label, de leur indice de réparabilité ou de leur vente en seconde main (reconditionnement ou vente d’occasion) ».
Associer le consommateur
Cette importance accordée à une consommation responsable, les web-acheteurs la traduisent en actes au moment de leur achat : ils sont 68 % à privilégier les sites français, 66 % à favoriser la livraison en point relais, et 51 % à envisager l’achat de produits issus de l’économie circulaire, toujours selon l’enquête KPMG-Fevad. Face à cette tendance, les e-commerçants s’engagent de plus en plus à informer leurs clients sur les impacts de leurs commandes et de leurs livraisons. « La démarche consiste à associer le web-acheteur pour lui permettre de faire des choix sans le culpabiliser mais en lui permettant de consommer de manière responsable, juge Marc Lolivier, tout en mettant en garde : il faudra faire attention à ne pas l’induire en erreur ou à lui fournir des informations qui soient parcellaires ou erronées. Si le consommateur veut savoir l’impact lorsqu’il commande via la Poste ou en point relais, la façon dont il se rend en point relais – en 4x4 ou à pied – change la donne ! »
Le challenge tient donc à la qualité de l’information communiquée, mais également aux gestes de tri et à la fin de vie des produits. Une démarche initiée de longue date chez Fnac Darty, détaille Géraldine Olivier, sa directrice de la RSE : « Pour tout ce qui concerne le tri, le recyclage et le réemploi, nous sommes, de par notre passé chez Darty, partie prenante sur la récupération de la DEEE [Déchets d'équipements électriques et électroniques]. Lorsque nous vous livrons une machine à laver, nous vous proposons de récupérer l’ancienne et nous allons encore plus loin en vous offrant de reprendre également d’autres appareils ». « Associer le consommateur est l’un des principes fondateurs de notre démarche. L’enjeu est double : sensibiliser et transformer les intentions en nouveaux comportements d’achat », résume de son côté Caroline Bordet Le Lann, directrice adjointe RSE chez Cdiscount. Avec ses 23 millions de visiteurs uniques mensuels, le pure player s’emploie à accompagner les cyberacheteurs avec des informations précises pour leur permettre de consommer différemment, à travers de nombreux guides d’achat, ou encore pour les rassurer, notamment via son guide du reconditionné et de l’occasion. « Nous travaillons aussi pour lever les freins qui peuvent limiter le passage à l’acte et pour assurer la qualité de l’expérience client sur ces nouveaux usages en proposant de l’aide à l’auto-réparation, la revente à des professionnels ou des particuliers, le don, l’achat de produits de seconde main. Nous tenons compte des différentes préoccupations environnementales, sociales et économiques des consommateurs. Nous leur proposons aussi des solutions simples, concrètes et digitales pour faire de la seconde vie un nouveau réflexe. Et pour aller au-delà de la sensibilisation, nous interpellons également le consommateur pour qu’il soit conscient de son impact et qu’il adopte de façon pérenne de nouvelles habitudes », poursuit-elle.
Pour Rakuten qui joue un rôle d’intermédiaire entre les acheteurs et les vendeurs, l’information fournie à ses acheteurs pour viser un achat tourné vers le développement durable est tout aussi importante : « La plateforme contribue notamment à la sensibilisation de ses utilisateurs à une consommation plus responsable en indiquant, pour chaque produit consulté, les émissions qui peuvent être évitées pour réduire l’empreinte carbone en faisant le choix de la seconde main plutôt que du neuf. Dans cette optique, nous venons aussi de lancer un dispositif unique dans l’e-commerce français, baptisé Vision’R, qui récompense les achats de ce type par des gains supplémentaires de pouvoir d’achat. Les engagements de la charte sur cet axe s’inscrivent donc dans la continuité des actions mises en place et de ce que nous avons envie de défendre en tant que plateforme e-commerce pionnière de l’économie circulaire », stipule Benjamin Moutte- Caruel, directeur des affaires juridiques et réglementaires de Rakuten France.
Inciter à des livraisons plus vertes
Fnac Darty entend aussi favoriser les bons gestes, notamment en « opérant par défaut un envoi groupé lorsque deux colis sont commandés à des disponibilités différentes, rendant payant l’envoi séparé », indique Pierre Soler, directeur transport national du groupe. « Pour la partie e-commerce, nous mesurons nos émissions par type de service en mettant en avant les modes les plus vertueux, et particulièrement le retrait en magasin qui est offert aux clients. Nous ne favorisons pas l’express vis-à-vis du consommateur. Une signalétique verte indique par ailleurs que le retrait en magasin est moins impactant sur l’environnement qu’un autre. » Du côté de Maisons du Monde, pour parvenir à sensibiliser le consommateur sur les répercussions environnementales de sa livraison, il s’agit tout d’abord de bien quantifier les émissions de CO2 des différents modes de transport. Le tout afin d’informer le client sur l’impact de sa livraison à domicile, en magasin ou en point relais, en étudiant les différences se jouant entre une livraison en 24h ou en 7 jours.
« La logique de cette charte nous a poussés à accélérer la mise en œuvre de ces mesures et nous ambitionnons de rendre ce calcul disponible aux clients l’année prochaine, indique Rémi-Pierre Lapprend, directeur RSE de Maisons du Monde. L’enseigne a par ailleurs rejoint l’initiative Fret 21 (initiée par l’Ademe et l’AUTF) lui permettant d’affiner les calculs des émissions CO2 des différents modes de transport. « Au-delà de l’information au client, il faudra également que nous l’encouragions à aller vers la mécanique la plus vertueuse. » Sur la mutualisation des commandes, l’exercice délicat consistera à expliquer au consommateur pourquoi il va devoir attendre pour ne bénéficier que d’un seul envoi tout en poursuivant la sensibilisation : avez-vous bien regardé toutes les dimensions du produit ? Êtes-vous allés voir le produit en magasin pour éviter les retours ? « Ce sont des éléments importants dans le discours que nous apporterons au client. Nous le faisons assez peu aujourd’hui tandis qu’avec la charte, nous nous sommes en- gagés à le réaliser avant le 1er janvier 2023 ». Un objectif qui implique donc un travail important sur la quantification des émissions de CO2 mais aussi sur le développement d’offres de transport plus durable « parce qu’informer le client c’est bien, l’inciter à prendre plus vertueux c’est mieux, et ce qui l’est encore plus, c’est de lui proposer une solution efficace et verte. Il faut que nous arrivions à définir cette nouvelle offre de livraison qui n’existe pas. Nous sommes en train de travailler avec des transporteurs dans certaines zones sur des carburants moins polluants. En 2022, nous allons packager cela dans une offre plus verte pour le client ».
Aller dans le sens de la compétitivité
Une tendance de fond en matière de RSE se dessine juge Marc Lolivier : « Nous nous trouvons face à un phénomène répondant à des demandes multiples et convergentes à la fois de la part des web-acheteurs qui montrent, selon les en- quêtes d’opinion réalisées auprès d’eux, une volonté d’agir sur l’impact environnemental de leur consommation, et de la part des sites : cela devient, pour les entreprises un élément d’attractivité et de fidélisation des collaborateurs. On voit également que du côté des investisseurs, c’est une dimension qui est prise en compte dans le choix des projets ».
Cette convergence d’opinions constitue un moteur venu alimenter cette tendance. Autre point important : les entreprises elles-mêmes ont réalisé que le développement durable pouvait tout à fait aller dans le sens de la compétitivité. « Pendant longtemps, tout ce qui touchait à la RSE et l’environnement était un peu subi et perçu comme des contraintes règlementaires pas toujours conciliables avec des objectifs économiques. On observe un changement de paradigme : les entreprises se rendent compte que c’est un élément différenciant, attendu des clients, mais aussi de compétitivité », détaille le délégué général de la Fevad. Exemple assez parlant de cette démonstration du côté de l’emballage : la diminution de leur taille par rapport au produit, en plus de réduire l’irritation des consommateurs, coûte également moins cher en matière. Une logique gagnant-gagnant, synonyme de compétitivité et de performance.
Crédit photo : © Cdiscount