Interview
Brexit : quel impact sur les supply chains ?
À la veille du référendum du 23 juin sur la sortie ou non du Royaume-Uni de l’Union européenne, Georges Bory, directeur de la stratégie produits et innovation de l’éditeur Quartet FS, s’interroge sur les conséquences qu’aurait un Brexit sur les supply chains.
Concrètement quelles seraient les conséquences d’un Brexit sur les organisations des chaînes logistiques ?
Tout ce que nous savons, c’est que cela amène beaucoup d’incertitudes. Un pays intégré à l’Union européenne s’assure d’une continuité logistique - qu’il s’agisse des procédures de douanes, de la TVA, la libre circulation des personnes -, tandis que les incertitudes sont nombreuses en dehors de l’UE. Concernant les règles douanières, il est très peu probable que des droits de douane soient mis en place sur certains composants industriels entre les entreprises européennes et la Grande-Bretagne. En revanche, les procédures seraient nécessairement beaucoup moins fluides. La fin de la libre circulation des personnes pourrait d’autre part avoir un impact à plus court terme. Le Royaume-Uni compte une très forte immigration d’Europe de l’Est, une forte proportion travaillant dans les entrepôts ou comme chauffeurs. En quittant l’Union européenne, il se couperait de cette main-d’oeuvre très flexible. On peut également se dire que la livre sterling va être dévaluée fortement ce qui représente un avantage sur les coûts. Là encore, l’incertitude demeure. Enfin, depuis le début de l’année, les décisions d’investissements, les fusions acquisitions ont baissé au Royaume-Uni. S’il y a Brexit, il est évident que ce mouvement va s’amplifier. Les décisions et les négociations vont devenir plus compliquées essentiellement pour cette raison : pourquoi investir en G-B alors qu’un important schéma logistique existe en Europe ?
De quelle manière envisagez-vous cette éventualité chez Quartet FS ?
Quartet FS édite une plateforme analytique (ActivePivot) au service de la prise de décision opérationnelle. Dans une supply chain, 80 % des éléments sont prévisibles mais il existe aussi 20 % d’imprévisible (grève, événements naturels…). Nous travaillons beaucoup dans notre logiciel à gérer ces situations imprévisibles et notamment à la manière d’optimiser des solutions alternatives. Depuis un mois environ, la possibilité que le Royaume-Uni quitte l’Union européenne est à considérer comme une situation imprévisible. Quelles conséquences cela aurait-il et comment y réfléchir ? Est-ce que les négociations vont prendre deux ans, sept ans ? Est-ce que la communauté européenne va essayer de punir le Royaume Uni ou leur dire que rien ne change ?
Comment réagir face à ces incertitudes ?
Il y a trois semaines personne ne donnait une chance au Brexit donc rien n’est prêt, personne n’a prévu quoi que ce soit. S’il y a Brexit, il me semble que la bonne réaction sera dans la création de capacités de production et de de stockage en dehors du Royaume-Uni, de manière à contrebalancer une incertitude possible. Face à cette imprévisibilité, il s'agit d’avoir un plan B, de pouvoir proposer à ses clients de nouveaux schémas logistiques pour parer à l’incertitude. Le fait d’être très souple et de proposer des solutions alternatives sera alors un avantage.