Interview
La Bretagne veut développer ses ports
Lucile Héritier, directrice des ports de la Région Bretagne, évoque les atouts des cinq ports de commerce de la région, les défis d’attractivité à relever ainsi que les enjeux de développement durable et de numérisation.
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Port de Brest / G. Pachoutine.
Quelles sont les spécificités des cinq ports bretons de transport de marchandises : Saint-Malo, Saint-Brieuc-le-Légué, Lorient, Roscoff-Bloscon et Brest ?
Ce sont des ports qui ont un hinterland géographiquement assez limité. Plutôt régionaux, ils desservent principalement la Bretagne. En avoir plusieurs permet une répartition homogène des possibilités logistiques et du développement de l’emploi autour de cette offre de services. Sur des trafics similaires, leurs spécificités les rendent complémentaires même lorsqu’ils se situent sur le même segment. Tous ces ports ont par ailleurs des destinations internationales, toujours dans ce souci de proposer aux chargeurs bretons de se connecter au reste du monde et de s’approvisionner loin, si leur business le nécessite. Même si la tendance actuelle est plutôt aux boucles locales soutenues par la Région, cette dernière souhaite également développer et entretenir le rayonnement des ports à l’international.
Quels sont aujourd’hui les freins au développement de ces ports ?
Beaucoup de trafics de marchandises nécessitant de passer par la voie maritime sortent et entrent de Bretagne sans passer par nos ports, au profit de Saint-Nazaire et du Havre ou encore des principaux ports du Nord de l’Europe. Nous le regrettons, car nous estimons que nous disposons de solutions logistiques locales, et qu’il serait vertueux du point de vue de l’environnement que ces marchandises ne passent pas par la route pour rejoindre des ports plus lointains. Elles peuvent prendre la mer directement depuis la Bretagne. Nous touchons ici à une problématique plus globale, celle de la méconnaissance par un certain nombre de chargeurs bretons de l’offre de services logistiques des ports de leur région. Certains logisticiens ne proposent pas à leurs clients de passer par ceux-ci, car ils sont organisés à une échelle nationale. Il y a donc un travail à mener pour expliquer que c’est possible. L’absence de connexion ferroviaire est également un frein : son développement permettrait aux ports de dépasser l’échelle locale et d’accueillir des marchandises venues d’autres régions de France.
Quels sont les autres enjeux à relever ?
Au niveau régional, il y a une volonté forte de développer l’énergie marine renouvelable car nous avons ce potentiel autour de nos côtes. Nous avons une feuille de route hydrogène très importante qui concerne particulièrement les ports. Le transport maritime va être un très grand consommateur et devrait donc rapidement permettre de rentabiliser des stations d’avitaillement. Sur l’enjeu de la numérisation, un nouveau système intégré CCS PCS (Cargo community system, Port community system) a été développé spécialement en Bretagne et mis en service le 1er janvier 2022. Nous réfléchissons aussi avec le port de Brest à la mise en place d’une plateforme agrégatrice de données, à la fois environnementales et d’exploitation (météo océanique, disponibilité des postes à quai, des grues…) de manière à ce qu’un navire à l’approche puisse optimiser son passage.
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