Innovation
Scapnor : l'automatisation au service de nouveaux formats
Depuis juillet 2017, la Scapnor, centrale d'achat régionale de E. Leclerc située à Bruyères-sur-Oise (95), bénéficie d'une installation logistique entièrement automatisée desservant les différents canaux de distribution classique et e-commerce. Un système de stockage et de préparation innovant, réalisé par l'intégrateur Witron, lui permettant d'adresser de nouveaux formats tout en assurant une logistique sans ruptures.
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Scapnor
Développement du multi-formats et du e-commerce, augmentation des volumes, optimisation du service aux magasins franciliens, difficultés de recrutement dans la zone de Bruyères-sur-Oise (95) où elle est implantée : quand la centrale d'achat régionale Scapnor du groupe E. Leclerc commence à réfléchir à l'automatisation de sa logistique pour les produits de grande consommation en 2012, elle fait alors face aux nombreuses mutations de la grande distribution, ainsi qu'à d'autres problématiques plus spécifiques. « Nous sommes la centrale d'achat ayant le flux le plus tendu de France. Les magasins que nous servons en Île-de-France ont souvent très peu de réserves de stockage, de par le coût et la rareté des surfaces où s'implanter. Le moindre accroc dans la chaîne logistique peut donc les pénaliser et provoquer des ruptures immédiates en rayon », explique Marc Le Bozec, directeur général de la Scapnor. Adressant Paris, le nord de l'Île-de-France, l'Oise et une partie de la Somme, la centrale d'achat assure la distribution pour une soixantaine de sites (hyper et supermarchés, e-commerce).
Et face à sa croissance, l'espace venait à manquer : « Nos surfaces ne suffisaient plus. Nous louions près de 70 000 m² de sites logistiques externes pour être en mesure de poursuivre notre activité », raconte Daniel Lucas, directeur des opérations. Autant de défis qui amènent alors la Scapnor à faire appel à Witron pour l'installation d'un système automatisé de préparation de commandes, s'inspirant de projets similaires déjà menés par l'intégrateur bavarois au sein de groupes de la grande distribution à l'international et de centrales E. Leclerc, la Scapalsace et la Scapest (suivies ensuite par la Socara, la Scapartois et la Socamil).
Un système adapté au bâtiment
Là où la majorité des précédents projets avaient été réalisés dans des bâtiments neufs, la décision est prise pour la Scapnor d'utiliser finalement le bâtiment existant de 12 000 m2 pour l'installation complète de l'OPM (order picking machinery) de Witron ainsi qu'une extension de 4 000 m² et 25 mètres de haut pour la construction d'un stockage palettes à grande hauteur automatique HBW (high bay warehouse). « Le concept logistique que nous avons développé pour Scapnor avait pour objectif de réutiliser le bâtiment existant afin de raccourcir le calendrier et d'optimiser le coût global du projet. La flexibilité de notre solution a permis une intégration aisée dans le bâtiment, même en tenant compte des contraintes architecturales. Ce faisant, le système modulaire a aussi été conçu pour envisager de possibles extensions de l'OPM et du HBW et donc pour absorber la croissance future et soutenir l'évolution des activités de Scapnor à long terme », précise Claus Holm, directeur Europe South West de Witron. Les travaux débutent en janvier 2016 jusqu'à l'entrée en production, à la mi-juillet 2017.
Après un semestre de montée de charge progressive, un total de 15 000 références sont désormais traitées par le système depuis début 2018, ayant permis à l'intégralité de l'activité pour les produits de grande consommation d'être réintégrée sur le site de Bruyères-sur-Oise. Seuls 4 % des produits, aux gabarits spécifiques (trop petits, fragiles, souples ou encombrants) font encore l'objet de manutention manuelle. « Nous avons intégré dans la machine beaucoup plus de produits qu'initialement pensé », note Daniel Lucas. Le projet d'automatisation a également été accompagné par une évolution du personnel de la Scapnor. « Nous avons accompagné l'ensemble de nos équipes dans l'évolution de leurs métiers, en les formant aux côtés des équipes de Witron, qui ont été très présentes au démarrage », souligne Daniel Lucas. Résultat : des tâches de supervision moins pénibles ou dangereuses et une équipe fixe, bien loin des taux de turnover affichés par le passé.
5 200 colis par heure
En pratique, les palettes en provenance des fournisseurs sont récupérées via 10 quais de chargement. Celles-ci passent alors par un des quatre postes d'injection automatique qui vérifient leur qualité et leur conformité. « Ces portiques s'assurent que les entrées sont en cohérence avec nos données de palettisation en termes de poids ou de volume. Ce contrôle est crucial pour le bon fonctionnement du système et a fait l'objet de nombreux échanges en amont avec nos fournisseurs », précise Camille Grizon, chargée de projets logistique chez Scapnor. Ces palettes complètes sont ensuite placées dans un stockage automatisé en grande hauteur, comprenant 37 800 emplacements et géré par huit transstockeurs, offrant 26 jours de stock à la plateforme logistique. Débute alors le processus de dépalettisation : après un défilmage réalisé par un opérateur (seule tâche manuelle du processus, permettant de s'assurer visuellement de l'état des produits), un prélèvement des colis de la palette par couche est effectué automatiquement, par aspiration ou serrage.
Les colis sont ensuite éclatés individuellement grâce un système de convoyeurs, déposés sur une tablette en plastique étiquetée avant d'être placés dans une grande zone de stockage. Dans celle-ci, ce sont jusqu'à 306 000 colis qui peuvent être conservés individuellement et transportés à l'aide de 26 mini-loads ultra dynamiques ayant accès à tout moment à l'ensemble des références. Lorsqu'une commande doit être réalisée, le système vient prélever les produits nécessaires dans ce stock colis et les met dans une séquence parfaite pour la palettisation via 10 palettiseurs automatiques COM (case order machine). Le tout à un rythme de 5 200 colis préparés par heure. Enfin, les palettes sont filmées et étiquetées avant d'être récupérées en sortie de machine par des opérateurs dans la zone d'expédition, qui les chargeront de manière traditionnelle. L'intelligence algorithmique du système prépare celles-ci selon des critères d'équilibre, d'optimisation de volume ainsi qu'en respectant précisément le séquençage des rayons pour chaque supermarché et drive individuel. « Nous avons augmenté la fonctionnalité de notre algorithme de calcul et des schémas de palettisation aux besoins de la supply chain multicanal de E. Leclerc, explique Claus Holm. Les hyper et supermarchés demandent un séquençage très précis des rayons et chaque magasin a son implantation individuelle. Les plateformes e-commerce ont besoin d'une palettisation individuelle selon les chemins de picking pour chaque drive. Des chemins qui changent en permanence en fonction de la rotation des produits ». « C'est un gain de productivité très fort pour nos équipes en magasin et qui ne peut être réalisé que par un système de ce type », souligne Marc Le Bozec.
Une logistique cadencée pour le e-commerce
Et les résultats sont là : « Nous avons atteint tous les objectifs que nous nous étions fixés aux côtés de Witron. Nous livrons de 75 000 à 100 000 colis par jour selon les pics, six jours sur sept, pour une soixantaine de magasins et sans aucun retard », résume Guillaume Hélin, responsable du site automatisé de la Scapnor. Une logistique industrialisée qui a également pu permettre de lancer dans les meilleures conditions une nouvelle activité e-commerce pour E. Leclerc : la livraison à domicile dans Paris intramuros, avec le service Leclerc Chez Moi. Débutée en février 2018, cette activité est entièrement traitée par la Scapnor qui alimente quotidiennement un site de distribution du dernier kilomètre, situé à Pantin (93). « Pour livrer à domicile en temps et en heure, il faut pouvoir s'assurer d'une logistique cadencée, sans ruptures. C'est ce que nous a permis le système automatisé de Witron », résume Marc Le Bozec. Le développement du e-commerce va également se poursuivre au coeur de la capitale avec l'ouverture de plusieurs drives piétons appelés E.Leclerc Relais. Un premier a ouvert ses portes en janvier 2019 dans le XVIIIe arrondissement et l'enseigne souhaite en implanter jusqu'à deux ou trois par arrondissement à terme. « Les volumes de la plateforme de Pantin vont grossir rapidement, mais cette démultiplication ne fera pas trembler le système, souligne Marc Le Bozec. Nous pourrons encore absorber une croissance de 20 % avec une extension du système dans le périmètre actuel avec deux autres lignes de préparation de palettes, soit au moins 1 000 colis traités en plus par heure. Ensuite, nous aurons toujours des capacités d'extension à chaque extrémité du bâtiment ».
De quoi permettre à la Scapnor d'aborder sereinement les 15 prochaines années, tout en évoquant déjà de nouveaux projets avec Witron pour la logistique des produits frais en flux tendu. « C'est un modèle différent car nous sommes sur du cross docking, sans stock. Nous échangeons actuellement avec Witron qui propose une solution parfaitement adaptée pour cette activité particulière et qui est déjà en réalisation avec d'autres centrales E. Leclerc. L'automatisation du frais serait la prochaine étape logique pour nous », précise Marc Le Bozec.
L'installation de la Scapnor en chiffres
■ 15 000 références traitées ;
■ 5 200 colis préparés par heure via 10 palettiseurs automatiques ;
■ Batiment grande hauteur de 25 mètres de haut et 4 000 m² ;
■ Stock de 37 800 emplacements palettes et 306 000 emplacements colis ;
■ Huit transstockeurs et 26 mini-loads ultra dynamiques.